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Écrans & Miroirs

Par Fefe
Publié le 2 novembre 2021

 Un parallèle peut être fait avec les sites de pornographie qui, eux, sont accusés de choses bien plus graves, comme des cas de vidéos prises sans consentement. Ou encore des vidéos présentant des personnes mineures. Pourtant, les critiques sont moindres et les condamnations morales bien plus éparses. Bien peu sont ceux qui s’indignent face aux vidéos douteuses qu’on peut trouver sur ces sites pornographiques. Cependant les histoires de diffamation, de menaces de mort et généralement du dédain centrés sur des créatrices de contenu OnlyFans sont légions, ils mènent jusqu'à l'interdiction de ce contenu.

profil. Mais cette critique semble être centrée principalement sur le corps féminin. En effet celui-ci, et ce n’est pas une nouveauté, semble être affiché partout pour plaisir visuel dans un monde pollué d'images publicitaires en tout genre. 

Il y a une certaine ironie, les critiques sur les jupes trop courtes, les tops trop transparents et les tenues trop osées sont légion. Elles sont constantes, qu'elles soient discrètes ou assumées et sont toujours à l'arrière de nos pensées. Par contre, personne ne crie à l'inapproprié quand on affiche des corps féminins dénudés pour vendre glaces, matelas, boissons laitières ou autre produit qui suit la technique marketing du “sex sells”. 

Le corps féminin semble être épris d'une étrange dichotomie, une fois indécent, une fois parfaite-

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“You painted a naked women because you enjoyed looking at her, put a mirror on her hand and you called the painting vanity, thus morally condemning the women whose nakedness you had depicted for your own pleasure.” - John Berger, Ways of seeing.

 

Dans les multitudes de critiques faites à notre génération, le narcissisme est peut-être un terme entendu, à travers des conversations critiques des réseaux sociaux et des selfies, des stories, des feed soigneusement affinés pour montrer notre plus

-ment affichable dans l’espace public. Quelle est la différence entre les corps dénudés sur le compte Instagram d’une connaissance et la publicité affichée sur nos écrans ? Dans un jeu de miroirs étrange, les images se reflètent sur nos écrans et nous amènent à nous interroger sur cette condamnation morale qu’on pose sur le corps féminin. 

 

Un cas intéressant pour mettre en évidence le “deux poids, deux mesures” au sein du jugement porté aux corps féminins serait la plateforme OnlyFans. Sur celle-ci on peut avoir accès à du contenu exclusif, protégé par des droits d'auteur et permettant aux créateurs de contenu d’avoir un revenu direct sur leur images. Cette plateforme est rapidement devenue prisée pour la pornographie. Effectivement le site apporte une sécurité et un contrôle qui manquent souvent dans les métiers de contenu adulte. Pourtant, l’application a reçu des critiques virulentes et des jugements moraux forts. Ainsi les millions de dollars que brasse le site sont rapidement devenu une source d'indignation. Il a même été décidé d’interdire le contenu adulte en octobre 2012.

Quelle est alors la différence entre l’utilisation des corps sexualisés sur OnlyFans et un autre site pornographique ?

On pourrait argumenter que la différence se trouve dans qui possède l’accès à l’image. En prenant le contrôle sur la manière dont les autres perçoivent leurs corps et sur qui a accès à ces images, les créatrices de contenu pornographique se le réapproprient.

Dans notre société et notre culture, on considère le corps des femmes comme un outil de marketing, un objet à sexualiser pour le plaisir du spectateur. Voir le corps comme l'extension d’une humanité, d’une personne avec ses propres droits à se faire rémunérer correctement, à contrôler son image dérange. Notre société aime regarder ces corps mais déteste que celles qui possèdes ces mêmes corps l’aiment et le montre.

Et c’est peut être ça qui enrage les grands critiques de l'approprier, ceux qui crient à la vanité tout en appréciant ces mêmes images qu’ils condamne moralement. On peut exposer ces corps à de multiples fins, mais on ne peut pas les posséder. 

 

Il est temps de se réapproprier nos corps, mais surtout de questionner les spectateurs qui ne peuvent pas en même temps apprécier l’image et la dénigrer dans le même souffle. 

Texte et dessin de Fefe

illustration de la rédactrice 

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