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I Want My Tik Tok Feed :

Ou comment les artistes et l'industrie musicale ont adopté le modèle du réseau social

Par julian.
Publié le 22 février 2022

En 1980, la sortie de MTV change la face de la musique : l’image de l’artiste prend plus d’importance qu’auparavant. 

La chaîne exacerbe les avantages du clip vidéo en tant qu’outil marketing, et les succès des vidéos Thriller et Billie Jean de Michael Jackson renforcent la position de l’aspect visuel comme composante clé de la pop mainstream. La chaîne contribuera à l’iconisation de la musique des années 80’, ainsi qu’au rock alternatif et aux boys-bands 90’. En 1995, la chaîne est transmise sur les cinq continents, sans compter les chaînes similaires diffusées partout dans le monde (MCM, Much Music, etc.)

 

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Artistes et labels doivent s’adapter au fonctionnement de la télévision et des clips vidéo, nouveau vecteur de promotion de la musique dont ils dépendent, dans un monde ou la même la radio diffuse ce qui se passe à la télé

(« Video killed the radio star », comme disaient The Buggles, le tout premier clip à être passé sur MTV). Entre 1980

et 2000 l’industrie musicale est passée d’un modèle promotionnel radio-centré à l’adaptation et l’adoption d’un modèle promotionnel où l’image de l’artiste occupe une place centrale.

Video killed the Radio star

Le Roi (la télé) est mort, vivie le Roi (Internet)

 

Les années 2000 sont un point de rupture : internet change la donne. Les majors et la télé ne sont plus la seule voie pour distribuer sa musique à un large public. Les artistes, comme les majors, doivent commencer à s’adapter à ce nouveau modèle qu’impose internet.

       

 

Les Logiciels Peer-to-Peer (Napster, Limewire, etc.) popularisent le partage de musique gratuite, ce qui marque l’émergence du format MP3 et début du déclin pour le support CD, affectant grandement l’industrie musicale qui base son chiffre d’affaire sur les ventes de ce support-ci.

Youtube fait sensation dès ses débuts en 2005, et donne déjà un terrain fertile pour que de nouveaux artistes soient découverts ; ils s’agit des premiers succès du « Phénomène Youtube » sous forme de vidéos virales comme «  Chocolate Rain » de Tay Zonday ou encore « Here it goes again » de OK GO. Les artistes prennent conscience que ce site peut servir d’une nouvelle avenue pour diffuser leurs clips ; la télé à un nouveau compétiteur qui est sur le point de la détrôner.

 

L’avènement des réseaux sociaux, notamment MySpace, change la façon dont les artistes et les fans échangent, ainsi que la façon dont les maisons de disques trouvent de nouvelles recrues. Les artistes peuvent et même doivent se constituer leur propre communauté et échanger avec. Parmi les pionniers de cette pratique, on trouve Les Arctic Monkeys, Soulja Boy (Ah… les joies des ringtones des années 2000s), ou encore Lily Allen.

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2013 - 2018 : Social media is killing the video star

 

L’année 2013 voit l’apparition de la plateforme de partage de vidéos de 7 secondes, Vine, et d’un nouveau phénomène : au lieu de la vidéo sur Youtube qui génère le buzz, cette fois c’est l’utilisation des chansons sur des mêmes ou des chorégraphies par les utilisateurs de ces plateformes qui entretient sa viralisation, et donc sa diffusion. En effet, certaines chansons montent déjà dans les charts américains pour leur utilisation dans les vidéos de « stars » de la plateforme : on commence à voir l’impact des influenceurs sur la diffusion de certains titres. On peut citer par exemple Hot N*gga de Bobby Shmurda ou Watch Me (Whip/Nae Nae) de Silentó. Lorsque Vine cesse ces activités en 2016, le phénomène se poursuit dans une moindre mesure avec l’application Musical.ly avant que celle-ci ne fusionne avec la plateforme chinoise Douyin pour former TikTok en fin 2016.

Au final, TikTok n’est pas tant un tremblement de terre, c’est plutôt une réplique dans la continuité des événements récents. Déjà en début de décennie, la viralisation des morceaux sur internet est l’une des principales avenues de promotions. Déjà avant Vine, des succès sur YouTube comme Single Ladies (Put a Ring On It)Gangnam Style de Psy ou encore Harlem Shake de Baauer sont passés par là, et les artistes sont présents sur Facebook, Twitter et Instagram ; eux et leurs équipes (du moins, ceux qui en ont), se sont déjà adaptés, acclimatés à la logique qu’impose le modèle des réseaux sociaux.

2019 : Boom...

 

 

 

 

 

 

Ceci-dit, pour le milieu musical, plus particulièrement la musique pop et indie, cette appli est une sorte de lieu de convergence de tous les phénomènes qui ont été cités, de la présence des artistes et de leur communauté sur la plateforme, à la viralisation des morceaux, notamment par les utilisateurs et les influenceurs répercutant sur les streams. D’un moment à l’autre les artistes vont réaliser qu'il ne suffit plus de s’acclimater à Tik Tok et aux réseaux sociaux, qu’il faudra  entièrement adopter leur logique de fonctionnement. Ce moment viendra quand deux Bombes H,  Bad Guy  de Billie Eilish et Old Town Road de Lil Nas X, seront lâchées sur le paysage musical. La déflagration propagée par Tik Tok attirera l’œil des majors tout comme celui des artistes indépendants ; un champignon en forme de panneau pointant l’explosion et indiquant « c’est par ici que ça se passe les gars ! » sera la première chose qu’ils verront.

 

 

 

 

 

 

Tik Tok témoigne aujourd’hui de cette adoption définitive par l’artiste et l’industrie du modèle des réseaux sociaux : non seulement celui-ci doit entretenir une présence en tout temps et sortir régulièrement du contenu, mais aussi, si les moyens sont présents, demander (comprenez payer) à des influenceurs pour qu’ils dansent sur la musique, boostant ainsi sa promotion. Dans l’industrie musicale, aujourd’hui et pour encore longtemps TikTok est un tremplin vers les charts. C’est pourquoi, pour le meilleur (Meet me at our spot (caught a vibe) de Willow, Télepatía de Kali Uchis) comme pour le pire (coucou Island Boys), c’est pas prêt de s’arrêter.

Par julian.

 

 

 

@simplementjulian.music

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  • @simplementjulian.music

P.S.: Qui dit “adoption” d’un nouveau modèle dit “apparition de nouvelles pratiques”. On peut citer, entre autres, des tactiques de marketing que les maisons de disques emploient pour faire croire à l’auditeur/au spectateur que le succès sur Tik Tok auquel il assiste est “authentique” (que veut dire ce mot? Vous avez 4 heures…). Pour les plus anglophones d’entre vous, la youtubeuse spécialisée dans la musique Songpsych en parle très bien ici: 

Sources :

- The conversation - 40 Years of MTV: the channel that shaped popular culture as we know it

- Le monde diplomatique - MTV : musique, télévision et profits planétaires

- BBC - Napster turns 20: How it changed the music industry

- The Music Business Journal - Celebrating YouTube’s Influence on Music

- Stereogum - The My Generation: An Oral History Of Myspace Music

- Animal New York - How Twerking on Vine -Sent Years-Old Rap Songs Up the iTunes Charts - Insider - How TikTok is changing the music industry

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