Brésil, élections dans une société divisée
Par Marie
Publié le 15 novembre 2022
illustration de fefe
Ce dimanche, la population brésilienne s’est dirigée vers les urnes pour voter dans ce qui est sûrement l’élection la plus importante depuis plusieurs années. Résultat : le candidat de gauche Lula est élu avec 50,9% des voix. De l’autre côté, colère et indignation règnent maintenant dans le camp de Bolsonaro. Illustration d’une société brésilienne plus divisée que jamais, cette élection restera sûrement gravée dans les mémoires.
Pour commencer, les différences entre les deux candidats étaient flagrantes : un syndicaliste et figure de gauche contre un conservateur populiste au passé militaire. Ils s'adressaient très clairement à deux franges distinctes de la société. En se basant sur la promesse de nouvelles aides sociales, d'améliorer la situation économique et la protection de l’Amazonie, Lula s'adressait principalement à un électorat de gauche mais aussi aux déçus du mandat de Bolsonaro. Par ailleurs, il utilisa l’exemple de la période de prospérité que le Brésil avait connu durant ses mandats précédents pour prouver son engagement. Malgré tout, son image reste entachée par les accusations de corruption et son passage en prison.
D’un autre côté, Bolsonaro fit campagne sur à peu près les mêmes sujets qu’en 2016. En effet, la protection de la liberté, des valeurs traditionnelles et la lutte contre le “communisme” sont restées au cœur de son programme. Son langage brutal plaisait à une partie des électeurs qui appréciaient sa franchise. Cependant plusieurs gaffes, notamment sur les femmes, ont beaucoup déplu aux Brésiliens. De plus, sa gestion de la crise de COVID-19 l’a désavantagé, le brésil étant le deuxième pays avec le plus de morts liées à la maladie.
Cette grande divergence entre les candidats s’est aussi faite ressentir dans la population. Lors du premier tour, 6 millions de votes séparaient les candidats. Bolsonaro partagea sur Twitter que ce fut “par la grâce de Dieu” qu’il avait pu déjouer tous les sondages en ayant un score beaucoup plus haut que ce qui était attendu. Ainsi commença la campagne pour un deuxième tour plus tendu que jamais. En effet, le débat du 28 octobre peut se résumer aux innombrables insultes lancées par les deux candidats. Durant deux heures, les Brésiliens ont plutôt assisté à un anti-débat; aucun des enjeux importants de la campagne n’ont été abordés sans que l’un des candidats traite l’autre de menteur. La discorde permanente entre Lula et Bolsonaro eut manifestement un effet néfaste sur la population. En effet, bien que le président sortant n’ait pas directement appelé à la violence, plusieurs personnes ont été assassinées par ses soutiens. C’est notamment le cas d’un ancien élu du parti de Lula tué par un pro-Bolsonaro deux jours avant l’élection à Sao Paulo. De plus, les manifestations violentes et affrontements entre les deux clans de soutien aux candidats sont devenus monnaie courante. Jamais dans l’histoire récente les Brésiliens n’ont été autant divisés.
Toutefois, il faut laisser place à l’espoir. Malgré les nombreuses manifestations des soutiens de Bolsonaro, ce dernier s’est engagé à “respecter la constitution” et a autorisé le début de la transition. Il dit comprendre la colère de ses électeurs mais appelle au retour au calme. De son côté, Lula compte sur son Vice-Président de centre-droit pour rassembler les Brésiliens et ramener le pays à une situation stable et prospère.
En prenant du recul sur la situation, il est possible de rapprocher cette élection présidentielle de celle des Etats-Unis en 2020. Non seulement les candidats étaient radicalement différents, mais les électeurs aussi étaient très divisés. De plus, Bolsonaro menaça tout de même à plusieurs reprises de refuser les résultats des élections en cas de défaite, comme l’a fait Donald Trump. Il reste maintenant à se demander si cette polarisation est un phénomène qui durera sur le long terme ou si l’on verra bientôt un peuple brésilien uni et le retour de la stabilité politique.