Réflexion sur mes vacances (oui sérieusement)
Par Michał
Publié le 26 avril 2022
J’ai passé ce long week-end de Pâques avec deux potes dans une ville qu’aucun de nous ne connaissait. Étant très peu intéressés par les monuments et musées qui attirent les foules teutonnes en claquettes chaussettes, on a surtout flâné dans les rues et sur les terrasses, portés par nos envies du moment.
On s’est fait la réflexion que ce contexte était très inhabituel – on a rarement, dans nos quotidiens, dans les lieux qu’on connaît, l’occasion d’exister sans but ni destination. On a des listes de choses à faire, des responsabilités professionnelles, universitaires, familiales, associatives, mais aussi des gens géniaux qu’on a envie de voir, des bouquins et les mille et un articles de presse que je conserve amoureusement pour plus tard dans mes mille et un onglets ouverts à lire, du sport à faire et peut-être veut-on en plus prendre le temps d’apprendre une langue, un instrument ou enfin, bordel depuis le temps qu’on y pense, se mettre plus sérieusement à la photographie.
La finitude de l’existence nous force à constamment réfléchir en termes d’arbitrages entre des usages concurrents de notre temps, à essayer de planifier, d’optimiser. Ah ce soir je fais ci pendant tant de temps et ensuite je lis ça et demain matin je devrais pouvoir faire ci et ensuite je mange avec X et là je peux travailler sur ça jusqu’à 17 heures parce qu’après je vais donner un cours et après et ensuite à des moments ça rend juste fou.
D’où le sentiment de liberté à juste déambuler dans les rues sans savoir où on est et encore moins où on va, rester assis au bord de la Seine avec devant soi du temps à n’en savoir que faire (prendre un coup de soleil, en l’occurrence voilà ce qu’on a fait). Sans le sentiment que quand même on devrait être en train d’en faire autre chose.
Ces réflexions m’évoquent un billet de blog que j’avais lu sur le site lundi matin intitulé « Le vrai nom du « second confinement » », en novembre 2020 (prenez un moment, réfugiés entre ces deux parenthèses, pour percuter encore une fois à quel point le passage du temps a été perturbé par le covid). Le texte proposait de voir ce supposé confinement comme un arraisonnement – le télétravail n’étant pas contraint et les raisons légales de sortir nombreuses, on n’était pas tant confinés que priés sous peine d’amende de ne se déplacer ou exister hors de chez soi que pour des raisons jugées valables par le pouvoir – travail, courses, rendez-vous médical, promenade dans une limite responsable et républicaine de kilomètres et de minutes.
Mon expérience du temps quotidien, hors vacances et moments souvent nocturnes et déraisonnables de lâcher prise, est le décor d’un arraisonnement de tous les instants. Je me dis que c’est pas en soi un problème – il y a des choses qu’il est nécessaire à faire et bien d’autres que l’on a envie de faire et ça fait sens d’essayer de mettre un peu d’ordre dans tout ça et pas gâcher la précieuse ressource qu’est notre temps. D’un autre côté il y a un sentiment de légèreté assez fou à oublier tout ça, s’asseoir au soleil et sourire bêtement.
Par Michał